Le Monde Diplomatique publie régulièrement des hors-séries. Celui-ci a particulièrement attiré notre attention, tant il démontre l’importance de l’information et de l’esprit critique, et la manière dont les Hommes en ont souvent joué pour manipuler les opinions. Ce petit plongeon dans l’histoire pour décrypter et révéler la part occultée, les mensonges et les manipulations, afin d’avoir une vue plus juste des faits actuels.
Son édito s’intitule « S’informer nuit gravement aux pouvoirs ». Nous ne pouvions qu’avoir envie de lire ce hors-série.
Nous avons fait le choix de résumer ci-après son édito ainsi que 2 articles, parmi les 35 que comptent le magasine.
Édito
On s’arrête. On réfléchit.
Information et dépendance
Article de Dominique PINSOLLE, maître de conférence en histoire contemporaine à l’université de Bordeaux Montaigne
Dénoncer le conformisme et les dérives des journaux, des radios et des télévisions est un exercice nécessaire et salutaire. On peut aussi défendre l’idée de soustraire ces entités aux lois du profit.
Marina GADONNEIX, « Remote control » 2015
L’article nous rappelle que Léon BLUM avait défendu l’idée de nationaliser la presse pour en faire un véritable service public.
De nombreuses personnalités ont depuis défendu cette idée :
- En 1944, la Fédération nationale de la presse française affirmait que « la presse n’est pas un instrument de profit commercial, mais un instrument de culture » dont la mission consiste à « servir la cause du progrès humain ».
- En 1955, Jacques KAYSER, journaliste impliqué dans les travaux des Nations Unies sur la liberté de l’information après la guerre, dénonçait le conformisme idéologique de la presse marchande, soutenant l’idée qu’il fallait nationaliser la presse.
- Le philosophe Paul Ricœur soutenait lui aussi cette idée dans le but de « soustraire l’information aux lois du marché et du profit ».
- Le ministre de la communication, en 1982, s’opposait fermement à une marchandisation de l’audiovisuel : « télé-fric et satellite Coca-Cola ne sont pas au programme ».
Depuis, la radio, la télé (puis Internet - ndlr) se sont ouverts aux entreprises privées. Et de privatisation à libéralisation, la liberté de la presse s’est effacée devant ses patrons (et actionnaires - ndlr).
Se rappeler l’histoire, conclut l’article, éviterait de taxer de « démagogique » ou « complotiste » ceux qui en appellent aujourd’hui à remettre en question l’ordre médiatique.
La transition énergétique n’existe pas
Article de Jean-Baptiste FRESSOZ, historien, chargé de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
Éolien, solaire ou biomasse sont appelés à prendre une part croissante dans le mix énergétique, ambitions de décarbonation oblige. Sauf que l’histoire montre que les énergies ne se remplacent pas. Elles se cumulent.
Ruben MARTIN DE LUCAS, « Minimal republic » 2019
L’auteur dénonce ici le discours qui consiste à proposer une nouvelle révolution (une nouvelle transition) pour résoudre les problèmes causés par la précédente. Révolution industrielle (transition du bois, vers le charbon puis vers le pétrole) aujourd’hui révolution hydrogène et transition énergétique...
Les politiques se nourrissent de ce discours porté par de nombreux scientifiques, peu rigoureux, qui confondent « dynamique technologique » et « dynamique matérielle ». Le problème vient du fait qu’une nouvelle technologie n’entraîne pas la fin d’une autre. Il n’y a donc pas transition, mais bien une accumulation.
- La révolution du charbon n’a pas entraîné la diminution de la consommation de bois. Au contraire !
- La même logique se retrouve entre le charbon et le pétrole. Car même si le pétrole à remplacer les machines à vapeur (qui fonctionnaient au charbon), il accroît indirectement la consommation de charbon à travers la consommation d’acier (nécessaire à la fabrication des véhicules) et de ciment (pour construire les routes).
L’histoire de l’énergie ne doit pas s’appréhender en phases, en transitions successives. “L'industrialisation de la planète repose sur une expansion symbiotique de toutes les énergies et de toutes les matières”.